L’ogre et le petit poucet

Un peu de mathématiques pour une équation compliquée :
Une fi lière comportant plus de 90 % d’apiculteurs de loisir, détenant un peu moins de 50 % des colonies et moins de 10 % de professionnels, détenant le complément, et dont l’encadrement sanitaire est proportionnel à ces données. Mais en matière sanitaire, un seul apiculteur oublié sur le chemin mettra en péril l’ensemble des dispositifs et audelà l’équilibre de la situation sanitaire générale.
Compétences :
Les agents sanitaires, un corps d’agents dont le vieillissement est inéluctable et qui perd ses compétences. Ces deux phénomènes sont entretenus par l’Etat qui n’a plus organisé de formations offi cielles depuis une dizaine d’années, ne permettant ni le maintien des compétences, ni le renouvellement des générations.
Mais le principal reproche fait à ces agents découle de la réglementation européenne qui attache la plus grande importance à l’impartialité des agents de contrôle. Or les agents sanitaires sont souvent des apiculteurs, d’où un possible confl it d’intérêts.
Au fi nal, cela se traduit par le constat sur le terrain d’un manque cruel de maillage sanitaire.
Mais, hors situation de crise, cet état de fait n’émeut que quelques inquiets de cyndinique* et quelques directeurs en charge de la Protection des Populations conscients de ne plus disposer non plus des compétences nécessaires en interne. Ce maillage insuffi sant s’est particulièrement fait ressentir lors de la mise en place du projet pilote de réseau d’épidémio-surveillance apicole par la Direction Générale de l’Alimentation. Il a alors été nécessaire de former en urgence un contingent d’intervenants sanitaires apicoles (ISA), nouvelle appellation pour des personnes qualifi ées pour l’essentiel sur le modèle des anciennes formations ; mais cette nouvelle appellation n’est certainement pas dénuée d’importance pour l’administration !
Avancée de la nouvelle gouvernance sanitaire :
Une moitié des conseils régionaux d’orientation de la politique sanitaire animale et végétale (CROPSAV) a été installée et le reste le sera d’ici la fi n de l’année.
Le dernier CNOPSAV (Conseil National…) a validé la liste des maladies de première catégorie qui se traduira par la parution d’un arrêté ministériel en début d’été. Mais quelles maladies apicoles resteront dignes d’une lutte organisée par l’Etat ?
Pour la filière apicole, l’exigence d’un OVS (Organisme à Vocation Sanitaire) unique pourrait être respecté par une structure à rayonnement national mais cette possibilité, bien que prévue par la réglementation, a du mal à trouver un écho favorable auprès des services du Ministre de l’agriculture ; ces derniers préférant une « phagocytose », selon les termes du Président de la Fnosad, par GDS France qui jusqu’à présent n’a manifesté qu’un intérêt que très relatif pour la filière apicole, en dehors de celui d’élargir son portefeuille sanitaire. Cette solution bénéfi cie à priori de l’aval des apiculteurs professionnels (inférieurs à 10 %) contre l’avis des apiculteurs pluri-actifs (supérieurs à 90 %), mais elle instaure une nouvelle politique sanitaire contre la volonté de la majorité avec les risques inhérents.
Les petits cailloux plantés patiemment par les agents sanitaires apicoles et la Fnosad depuis des décennies leur permettront-ils d’échapper à l’appétit de l’ogre ? Rien n’est moins sûr, contrairement au conte pour enfants !
* Cyndinique : science des dangers