Un monde nouveau en marche

En ce 21ème siècle nous vivons dans un monde en perpétuels changements, changements qui à mon sens ne se font pas toujours pour le bien de l’humanité.
Bien entendu l’abeille tout comme l’apiculteur n’échappent pas à cette règle.
Prenons l’abeille.
Nous avons toujours varroas et alors que la meilleure des attitudes à adopter par les apiculteurs est de soigner ses ruches à l’aide de médicaments et autres molécules autorisées, nous entendons toujours des apiculteurs qui prétendent avoir des abeilles résistantes et qui de ce fait n’interviennent nullement pour lutter contre cet acarien. Est-ce une attitude responsable ?
Une autre question apparaît. Il a été demandé un moratoire à l’encontre de trois néonicotinoïdes, moratoire qui porte sur leur application aux quatre grandes cultures à savoir : colza – tournesol – maïs et coton. Or ces pesticides sont largement utilisés sur les cultures vivrières (légumes notamment) et en arboriculture fruitière. Cet usage n’entre pas dans le champ du moratoire alors que les abeilles sont présentes dans l’ensemble des espaces agricoles. Comment faire des recherches sur les effets de ces néonicotinoïdes s’ils sont interdits sur certaines cultures mais dans le même temps largement utilisés, sur d’autres ?
Dans les années à venir, il est certain que nous aussi nous assisterons, en Alsace, à l’arrivée du «Frelon Asiatique». Nous y serons confrontés comme tous nos collègues où le territoire est infesté, il nous faudra nous adapter à cette problématique et surtout lutter contre. Et ce n’est pas fini avec tous ces échanges mondiaux, qu’est-ce qui attend encore notre abeille ? Parlons de l’apiculteur.
Si l’abeille doit s’adapter à un nouveau monde et cela se fera avec beaucoup de casses, l’apiculteur lui aussi doit évoluer et surtout changer du tout au tout. L’apiculture d’aujourd’hui ne ressemble plus du tout à l’apiculture d’après guerre. Si dans les années 60 – 70 nos responsables apicoles ont voulu évoluer, c’est qu’ils ont bien remarqué que des changements allaient s’opérer. Leur but était de participer activement à ces changements. Alors que maintenant nous sommes à l’heure européenne et que bien des notes et règlements nous viennent de là, les apiculteurs refusent les évolutions bonnes ou mauvaises.
Je viens d’organiser un voyage d’étude de quelques jours en Slovénie. Je dois dire que nous tous avons été bluffés par le dynamisme des apiculteurs professionnels et pluri-actifs de la région visitée. Nous avons pu voir des centres apicoles initiés par une centaine d’apiculteurs mais chose très importante soutenus et encouragés par les hommes politiques du secteur mais aussi par l’ensemble du Pays et qui plus est, soutenus financièrement par l’Union Européenne. Petit exemple, lorsque nous nous battons pour obtenir péniblement 30 % de subvention sur tel ou tel poste, en Slovénie les subventions atteignent les 80 % – en finalité ils n’ont à supporter que la TVA.
Cela dit nous les Français nous avons, nous aussi, beaucoup de qualités :
– nous créons des structures qui absorbent les crédits
– nous faisons des réunions et discutons beaucoup
– s’il le faut nous savons manifester,
mais au niveau du terrain depuis des décennies rien ne change. A mon sens l’abeille devrait être reconnue d’intérêt général. Au S.N.A. et à l’Abeille de France, nous y travaillons, le document est prêt et a été soumis au Ministre. Nous devrions placer notre abeille sur un piédestal, non plus décider et en dernier lieu se rendre compte de la présence de l’abeille ou simplement ignorer l’abeille qui dans la plupart des cas subira les conséquences néfastes de ces décisions. Je suis personnellement bien placé pour parler de cela car je suis un des apiculteurs dont les ruches ont été impactées par ce qui a été appelé l’année dernière le «Miel bleu».
Mon propos n’a qu’un but, c’est de réveiller la conscience des apiculteurs car les changements à venir se feront que ce soit avec ou sans nous et nous avons à ce jour la responsabilité de préparer l’apiculture de demain pour ceux qui, de plus en plus nombreux nous rejoignent. Mais cette nouvelle apiculture ne pourra se faire sans l’avis de la base et surtout pas sans l’approbation de celleci. Mais je constate qu’actuellement les décisions viennent du haut de la pyramide et tombent sur les apiculteurs, les unes après les autres comme des sanctions.
En conclusion nous n’avons que deux choix : Ou nous participons à ces changements et faisons entendre notre voix ou nous disparaissons. Pour ma part j’opte pour la première hypothèse. N’oublions pas que notre abeille était sur cette terre bien avant nous, elle en a traversé des tempêtes et des bouleversements mais elle est toujours présente aux côtés de l’homme. Ne tirons pas trop sur la corde car nous risquons qu’un jour elle aussi se mette à nous ignorer plaçant l’être humain devant des problèmes gigantesques.