La gestion du risque… un début d’année riche en actualités
Le début d’année fut chargé pour le monde apicole, entre débat sur l’étiquetage, produits phytosanitaires et réunions de la filière apicole, guère de repos.
Des grains de pollen dans mon pot de miel
C’est sans doute le vote au Parlement européen qui aura fait le plus parler de lui en ce début d’année : Miel et OGM ne font pas bon ménage ! Le débat aura duré plus d’une heure pour statuer 1 : le pollen est-il un ingrédient ou un constituant du miel ? Une question triviale devenue cruciale (et sans doute aussi un peu perverse) aux regards de la loi et de la co-existence des fi lières mais aussi sur des répercussions sur le miel lui-même (production primaire ou non, étiquetage ou non, analyses systématiques, défense des conditionneurs, défense des consommateurs, etc.). Remercions M. Bablok, la grande fi rme productrice du célèbre maïs MON810 et la Cour de justice européenne pour avoir créé un imbroglio juridico-technico-éthico-économique dont l’apiculture, prise en otage, se serait bien passée. Mention spéciale, tout de même, au représentant polonais qui au milieu d’un débat « peu passionnant » a eu le courage et l’honnêteté de dire (très justement) que si le fond du problème est la mise en culture des OGM, alors les Etats membres doivent prendre leurs responsabilités et en interdire la culture ! J’applaudis !2 Le pollen est désormais dans le camp des ministres européens.
Produits phytosanitaires, mention « abeille » et évaluation du risque
Autre actualité : le « Prix des destructeurs de la planète » remis le 23 janvier à Davos. Les fi rmes Bayer, Syngenta et BASF sont arrivés second sur les marches du podium des entreprises qui causent le plus de dommages à l’environnement, nous espérons qu’elles ne sont pas trop déçues…
Et oui, les produits phytopharmaceutiques occupent une grande partie du temps libre des apiculteurs et de leurs représentants. La littérature est foisonnante, ce début d’année a été très prolifi que en la matière, plusieurs articles scientifi ques démontrent, une fois de plus, ce que les apiculteurs ont depuis longtemps observé et clamé : les pesticides utilisés modifi ent le comportement de leurs abeilles, les font dépérir, mourir, cela a aussi des répercussions sur le reste des pollinisateurs. D’où un nouvel appel à l’arrêt de l’usage des néonicotinoïdes par 5 syndicats apicoles dont le S.N.A. Autre fait marquant, le constat des médecins et un colloque organisé à l’Assemblée nationale sur le thème : « pesticides : santé et biodiversité ». Les députés à l’origine de cette initiative appellent à un plan EcoPhyto plus ambitieux. Les dérogations à l’épandage ne doivent se faire que sous la stricte condition d’absence d’alternative, l’argument du « je n’ai pas eu le temps » [d’anticiper] n’en est plus un. Au Ministre en charge de l’écologie de clairement dire concernant la toxicité des produits phytopharmaceutiques : « Nous avons suffi samment de connaissances pour agir ». Des actions concrètes sont en oeuvre, à l’image de la loi sur l’utilisation des pesticides dans les espaces publics et les jardins.
Quant à l’évaluation même du risque et aux autorisations de mise sur le marché (AMM) des produits phytosanitaires, les députés ont acté un transfert des compétences attribuant à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses), non seulement le rôle d’évaluateur mais aussi de décideur …. qui relève du politique. Ce n’est pas sans susciter quelques interrogations.
Agriculteurs et salariés agricoles sont les premiers confrontés aux risques induits par les méthodes de production agricole et sur ce point, l’enseignement agricole a du travail à faire car comment réagir face à ceux qui se défi nissent parfois comme « applicateurs » ? Mais comment sommes-nous passés du terme paysan à ce terme plus que réducteur ?
Un agriculteur, maïsiculteur de son état, qui ne se défi nit plus par sa culture mais par sa méthode de production à gros renfort de produits chimiques nécessitant une liste de précaution pour sa dite application…
La mise en place de « modules », de journées de sensibilisation à l’apiculture et au monde des pollinisateurs agricoles est une initiative à encourager ; elle portera sans aucun doute ses fruits d’ici quelques années.
L’agriculture, le monde agricole, dont on ne saurait soustraire l’apiculture, est un « moyen », un lieu pour recréer un « contrat social », tant au niveau local pour cohabiter dans l’espace rural qu’au niveau national pour retrouver une mission de nourricier, de « gardien de la nature »… partenaire de la biodiversité.
Que les Gens Inventifs Entousiastes et Eco-responsables (G.I.E.E.) se pérennisent et se multiplient, que les surfaces d’intérêt écologique (SIE) de la nouvelle PAC soient exemptes de tous intrants chimiques !
En cette période, soyez les gardiens de vos ruches car les risques sont là…
Un événement cependant pour vous divertir : le salon de l’agriculture et son célèbre Concours général des miels et hydromels qui débutera à la fi n du mois.
1 Peu de présents dans l’hémicycle lors des débats… mais plus de 650 eurodéputés lors du vote.
2 Nous pouvons aussi saluer la décision du Parlement européen qui s’est prononcé contre la mise en culture sur le territoire européen du maïs TC 1507 mais les Etats membres devront se prononcer d’ici la mi-février pour respecter les délais impartis par le jugement de la Cour de justice de l’Union européenne.