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OGM…?

Son miel contenait du pollen de maïs MON 810. Notre collègue, apiculteur en Bavière, a saisi le Tribunal administratif. Ce maïs était cultivé à des fins de recherches au cours de ces dernières années sur les terrains de l’Etat. Le tribunal a demandé à la Cour Européenne de Justice si du miel contenant du pollen de maïs MON 810 nécessitait une autorisation de mise sur le marché en tant que denrée alimentaire produite à partir d’OGM.

L’arrêté rendu (1) épingle bel et bien le miel portant des traces d’OGM. Mais cet arrêté, selon une information allemande, pourrait se retourner contre les agriculteurs utilisant ce type de semence et les apiculteurs indemnisés dans le cas de contamination des produits de la ruche. Ce jugement toutefois peut apporter un supplément d’argument à tous ceux qui contestent la culture des plantes OGM.

Sur ce point particulier, nous avons relevé l’intention de notre Ministre actuel de l’environnement de prendre « une nouvelle clause de sauvegarde » (2). Nous espérons que l’engagement sera tenu.

Mais n’y a-t-il pas quelque incohérence dans la décision prise par la Cour de Justice et notamment dans son communiqué de presse ?

? La CJCE ne reconnaît pas au miel son caractère de production agricole primaire. Le miel serait la conséquence du processus de fabrication au cours duquel l’apiculteur introduit un ingrédient, le pollen.
? Le pollen dans ce cas n’est plus comme la directive 2001/110 le précise, un constituant mais un ingrédient. Plus succinctement la Cour de Justice démontre que le pollen est un constituant du miel et décrète ensuite qu’il s’agit d’un ingrédient. Il est prématuré de tirer les conséquences de cette affaire sur l’ensemble du monde apicole et du monde agricole en général et de nombreuses questions viennent à l’esprit.
? Est-ce que l’absence de cultures OGM en France les épargnera de pollen OGM ? Nous savons et nous connaissons le rôle de la météo avec les vents de sable venant d’Afrique du Nord. Nous sommes proches de l’Espagne et du Portugal où se concentrent les plus grandes surfaces de cultures OGM.
? Les importations de miel seront-elles plus difficiles, voire interdites et pour combien de temps ?
? Y aura-t-il à moyen terme une interdiction totale des OGM sur toute l’Europe. Enfin, vouloir faire croire que quelques grains de pollen microscopiques justifient un étiquetage particulier et les analyses qui s’y rattachent, est destiné à anéantir toutes les productions de type familial.

L’étiquetage des denrées issues de filières sans OGM est en cours de discussion au niveau de la France. La consultation préalable de l’ensemble de la filière apicole prévue n’a malheureusement pas eu lieu. Deux options dans deux hautes autorités sont envisagées, celle qui réserverait la mention « miel sans OGM » aux ruches situées à plus de trois kilomètres des cultures et celle qui fixerait un rayon de x kilomètres, option sur lesquelles il est nécessaire de réfléchir. Au niveau de notre Fédération, nous sommes opposés à tout étiquetage spécifique OGM, on ne peut pas valoriser son produit en rabaissant celui des autres. Nous n’avons pas besoin des OGM.
Cet arrêté rendu par la Cour Européenne ne fait finalement qu’ouvrir un vaste débat qui déborde largement le produit miel.
Pour conclure, nous rappellerons que seulement huit pays parmi les vingt sept que compte l’Union Européenne cultivent des organismes génétiquement modifiés à des fins commerciales. L’Espagne et le Portugal cultivent à eux deux plus de 90 % de ces cultures, alors qu’ailleurs les surfaces tendent à diminuer, notamment avec une réduction importante des surfaces consacrées au maïs BT RON 810 et à la pomme de terre AMFLORA . En Allemagne, les surfaces cultivées en OGM se réduisent à un champ de deux hectares contre quinze en 2010. Qu’un agriculteur change d’avis, les surfaces diminuent ou augmentent.

Ce problème général à l’agriculture et à l’apiculture n’est pas facile à appréhender tant sont complexes à la fois les causes, les conséquences et les remèdes. L’apiculture n’avait pas besoin de ce nouveau sujet d’inquiétude, déjà que nous sommes collectivement mobilisés contre Vespa Velutina, les pesticides, les diminutions de récoltes, les mortalités et une législation de plus en plus contraignante mais dont on observe qu’à l’arrivée, elle est essentiellement orientée vers la raréfaction de l’apiculture de type familial et la diminution d’une apiculture dite pluri-active.

Vos avis et suggestions seront appréciés afin que notre groupe de travail dirigé par un de nos administrateurs puisse étoffer davantage encore, à l’aide d’exemples concrets, son argumentaire.

 

(1)voir page 9 • (2)voir page 8