APPROFONDISSEMENTS A LA LUMIERE DE LA RECENTE SUSPENSION DE SUBSTANCES ACTIVES PAR ENROBAGE

Connaissances acquises

1. La coïncidence entre mortalité printanière des abeilles et semis du maïs, observée par les apiculteurs est clairement démontrée par la documentation relative au « monitorage de phénomènes de dépeuplement et de mortalité des abeilles en territoires à différentes destinations agricoles en Vénétie et Emilie – Romagne ». En particulier, on assiste à une mortalité élevée d’abeilles dans les aires où la culture du maïs est prédominante, concomitamment aux semis fin mars, début avril. Des résultats des analyses chimiques, il semble raisonnable d’attribuer, au moins en partie, de tels dépeuplements à l’emploi d’insecticides néonicotinoïdes.
2. Des travaux du Dr Greatti de l’Université d’Udine, il apparaît qu’une cause vraisemblable de mortalité des abeilles, correspondant aux semis du maïs, est la dérive aérienne de fragments solides d’enrobages qui se déposent sur la végétation limitrophe aux champs semés. De tels fragments, imprégnés d’insecticides employés presque purs pour l’enrobage, pourraient rendre toxique la végétation des tournières et en particulier les gouttes de rosée avec laquelle les abeilles viendraient en contact.
3. Il a été fourni une documentation sur l’absence de mortalités printanières d’abeilles en territoire non maïsicoles et donc dépourvus de valeur aux fins de la réalité nord Italienne. Probablement il serait opportun de déplacer ultérieurement vers le Nord les expérimentations, en direction du Cercle polaire arctique.
4. Les entreprises intéressées ne contestent pas la possibilité que des fragments solides d’insecticides employés pour l’enrobage puissent retomber sur la végétation spontanée limitrophe. Mais ils estiment que de tels fragments ne sont pas en mesure de rendre le nectar et le pollen dangereux pour les abeilles.
5. De la lecture des résultats d’essais en champ (et semi champ), il apparaît probable que de tels fragments ne soient pas suffisants pour rendre toxiques le nectar et le pollen des plantes. Par conséquent, ce qui est affirmé par les firmes productrices d’insecticides semble convaincant. Mais les abeilles meurent concomitamment aux semis du maïs ! Pourquoi ? Si c’est la faute des insecticides, comment et quand viennent-ils en contact avec nos abeilles ?

Causes de mortalité

La quantité de principe actif qui vient à tomber en bordure des semis de maïs paraît vraisemblablement suffisante pour empoisonner des éventuelles gouttes de rosée avec des conséquences létales probables sur les abeilles. Les considérations émises par les entreprises ne vont pas à l’encontre de cette argumentation et ignorent en fait les travaux expérimentaux de Greatti.
En particulier, les considérations sur la dangerosité vis-à-vis des abeilles des principes actifs qui pourraient retomber sur la végétation entourant les semis sont limitées à l’effet toxique de contact ou à l’absorption de nectar contaminé par les molécules qui ont activité systémique vis-à-vis des plantes.
Bien différente est l’hypothèse d’un empoisonnement de la rosée par les retombées de fragments solides imprégnés de principe actif ! La comparaison devrait être faite par rapport à l’absorption directe des solutions aqueuses. A ces considérations s’ajoute la démonstration que les gouttes d’exsudation (gouttelettes d’eau que toutes les jeunes plantes de maïs produisent en abondance sur la pointe des feuilles) de plantes obtenues de graines de maïs enrobées, si elles viennent à être bues par les abeilles, les tuent dans deux à dix minutes, et dans 20 à 40 minutes si elles ne sont goûtées qu’un instant du bout de la langue.
Merci à la collaboration du Prof. Andrea Tapparo du Département de sciences chimiques de l’Université de Padoue dont les analyses ont mis en lumière la présence de néonicotinoïdes en raison d’une dizaine de milligrammes par litre (les solutions employées pour les traitements insecticides contiennent une centaine de grammes par litre ou bien elles ont un contenu en néonicotinoïdes qui n’est que 5 à 10 fois plus concentré que les gouttes d’exsudation). Par conséquent, il n’est pas nécessaire de chercher des facteurs sublétaux. Il est important d’établir si l’abeille vient au contact avec les gouttes létales, qu’il s’agisse de rosée ou d’exsudation, sur le maïs ou sur la végétation spontanée.

Conclusions et propositions pour de futures recherches

Il sera opportun d’évaluer si la retombée d’insecticides, de néonicotinoïdes ou non néonicotinoïdes, systémiques ou par contact, peut réellement empoisonner les gouttes de rosée sur la végétation environnante des champs.
1 – Il suffit d’effectuer de simples et banales épreuves directes de toxicité sur les abeilles. Toute la richesse des modèles existants laisse le temps de trouver.

2 – Les essais doivent être effectués même dans les aires à plus haute vocation maïsicole, c’est-à-dire entre le Po et les Alpes, pour donner réponse aux producteurs de maïs italiens.
3 – Il serait opportun d’impliquer dans les recherches le Dr Greatti (Université d’Udine) auquel on doit l’hypothèse de la toxicité liée à retombée de poussières d’enrobage du maïs,
4 – Il serait opportun d’effectuer des observations du comportement des abeilles dans les périodes de semis et en particulier il est essentiel de vérifier si effectivement les abeilles utilisent des gouttes de rosée en présence ou à défaut de fleurs sur la tournière.
5 – Il est important de vérifier si, comme c’est probable, lorsque commencent les grandes floraisons (cerisiers, poires, pommes, prunes) les abeilles ne cessent pas de fréquenter les champs semés, rendant alors compatibles l’enrobage du maïs, la survie des abeilles et les semis tardifs (ou non anticipés).Enfin, il serait souhaitable d’arriver à l’adoption de critères communs de lutte intégrée qui permettent l’emploi rationnel de l’enrobage de semences sans recourir à des suspensions manichéennes qui pourraient, entres autres, favoriser l’emploi de principes actifs plus dévastateurs et en concentrations plus élevée.

Vincenzo Girolami : Université d’Etudes de Padoue, Département d’Agronomie environnementale et des Productions Végétales