Edito de Frank ALÉTRU, Président du Syndicat National d’Apiculture et de l’Association des Apiculteurs professionnels européens (EPBA)

Comme l’eau sur le sable…

Quand décembre est arrivé, vient le temps du bilan de l’année écoulée.

Concernant nos productions de miel, le bouleversement climatique a donné des résultats très contrastés selon les régions.
La récolte nationale ne dépassera pas les 15 000 tonnes, ouvrant les portes du marché français aux importations, et aux fraudes.

Du côté sanitaire, la vigilance vis-à-vis de la varroase est devenue un réflexe qui s’inscrit dans l’itinéraire technique des apiculteurs sérieux et respectueux de leurs abeilles. Seule
cette discipline sanitaire au sein de nos ruchers, associée à l’alternance des modes de lutte, et aux performances hygiéniques de nos colonies permettront de poursuivre la réduction
des pertes automnales et hivernales.

Pour ce qui concerne l’expansion du frelon asiatique, le bilan est négatif, et les dégâts massifs qu’il a provoqués cet automne dans les ruchers le prouvent. Les moyens de lutte concrète et généralisée sur le terrain ne sont toujours pas soutenus par l’État, malgré nos relances répétées auprès des ministères concernés. Sur le budget de 115 millions d’euros du plan national de protection des pollinisateurs, c’est un montant ridicule qui est attribué au plan de lutte contre le frelon asiatique, les millions se distribuant ailleurs … De plus, son contenu n’apporte aucune solution concrète sur le terrain. Car ce n’est pas le financement de « référents frelon asiatique, sans armes » dont nous avons besoin, mais bien du financement d’une panoplie d’outils de lutte, déployée sur le terrain, permettant la protection des ruches par le piégeage sélectif des frelons asiatiques et par la destruction des nids.

Face au manque d’ambition de l’État, certaines collectivités locales conscientes de l’urgence se mettent en marche, seules ! Tel Martial SADDIER, Président du département de la
Haute-Savoie qui vient de montrer l’exemple, en finançant plusieurs milliers de pièges sélectifs sur un programme triennal.

Les gestionnaires des espaces naturels préservés, tels que les parcs nationaux et régionaux, le Conservatoire du littoral, certaines agglomérations et autres structures opposées à l’abeille mellifère qui ne font absolument rien pour protéger la faune
pollinisatrice sauvage de ce prédateur, feraient bien de s’en inspirer, plutôt que d’aggraver le déficit de pollinisateurs et de pollinisation, en expulsant les ruches de ces territoires.
Ces responsables sont-ils vraiment compétents ?

Nous aurions pu compter sur l’Interprofession (InterApi), si celle-ci fonctionnait en tenant compte de la réelle représentativité démocratique des structures qui composent le Collège
« amont » (producteurs). Mais ce n’est pas le cas, et cela nous a amené, avec nos collègues de l’UNAF et de la Coordination rurale, à en démissionner et InterApi manque aujourd’hui de compétences et surtout de légitimité ! Quant à son efficacité, en regard des cotisations obligatoires prélevées chez les apiculteurs déclarant plus de 50 ruches par la MSA, et du montant collecté (plus de 600 000 euros), le compte n’y est pas. Aucun retour concret et efficace pour les apiculteurs, provoquant inévitablement déception et colère.

Concernant le Programme apicole européen, la France dispose d’un budget prévisionnel annuel de 12,8 millions d’euros, déterminé selon le nombre de ruches qu’elle a déclaré. Toutes les ruches sont prises en compte, y compris celles des petits apiculteurs qui représentent environ 45% des ruches déclarées en France. En l’état actuel du programme d’actions 2023 déjà voté, pas un euro ne reviendra aux petits apiculteurs, pire encore, le texte précise expressément que sont exclus des aides à la formation apicole « les syndicats, les ruchers-écoles et les apiculteurs » !!

Lors de la dernière réunion du Comité sectoriel apicole, le SNA, soutenu par l’UNAF, a contesté cette situation inacceptable et a demandé une révision du budget de 2024 avec une prise en considération des besoins des petits producteurs, ainsi que de meilleures aides pour les professionnels. Selon les chiffres présentés, seulement moins de 30% du budget parviendront jusqu’aux apiculteurs, quelques soient leur nombre de ruches.
Ainsi, nous constatons que les centaines de millions d’euros des différents budgets, qui devraient revenir principalement à l’apiculture, disparaissent comme l’eau versée sur le sable !

Une confiance excessive a été accordée à des structures opportunistes qui se sont emparées des budgets, ou qui profitent de financements de complaisance au détriment de l’apiculture française. Plus que jamais, le syndicalisme apicole majoritaire doit reprendre le contrôle des destinées de la filière et des fonds qui devraient lui revenir.

Au nom du comité de rédaction de la revue, du Conseil d’administration du SNA et de nos collaboratrices, nous vous souhaitons d’excellentes fêtes de fin d’année.

 


 

SOMMAIRE

3 Édito
Comme l’eau sur le sable…

Actualités
6 Anses : plateforme de dialogue sur les AMM
8 Autriche : victoire juridique des apiculteurs sur l’étiquetage

10 Expérimentation 
Bilan final de l’expérimentation sur l’hivernage artificiel des ruches (oct 21 / sept 22)

16 Revue des revues
Allemagne : un nouveau service pour l’analyse des miels

19 Réponses aux lecteurs

21 Pétition
Sauvons la pollinisation

22 Pratique apicole
Bien préparer janvier

23 Infos nationales
• Audiences aux ministères
• Haute-Savoie : campagne de piégeage

24 Rencontre
Le groupe Méthodes-Abeilles

26 La rubrique du néophyte
Décembre : le bilan

28 Santé de l’abeille 
La fausse-teigne, Une vraie plaie pour les apiculteurs !

30 Api-foresterie
Qui aime l’abeille, aime l’épine… Des mellifères qui piquent Partie 3

35 Simapi 2023

36 Planète miel 
Contrôle et traçabilité des produits de la ruche par la palynologie – 21

38 Apithérapie
Miel et propolis face à la toux

42 Recettes au miel
• Magret de canard, sauce aux airelles & gnocchis de patate douce
• Bûche mousse au miel & myrtilles

44 Société centrale d’apiculture
Concours des miels Paris/Île-de-France 2022

46 Vie des structures apicoles

52 Librairie

55 Petites annonces

57 Abonnement & assurances apicoles

58 Sommaire annuel

62 Infos pratiques