Les insecticides TS : l’abeille exposée autrement !
Le schéma d’évaluation des risques pour abeilles est fait au départ pour les produits pulvérisés et non pour les produits utilisés en traitement de semences ou de sol. C’est là qu’est le problème car les produits utilisés en traitement de semences ou de sol conduisent à une exposition de l’abeille spécifique, différente de celle obtenue par les produits pulvérisés. On peut caractériser ces différences comme suit :
• l’exposition se fait principalement via les sources de nourriture, eau, nectar et pollen, et non par la dérive lors des vols de butinage ; elle est donc orale plutôt que de contact ;
• la nourriture contaminée est ramenée à la ruche où elle sera utilisée par toutes les abeilles de la colonie. Elle est donc susceptible de contaminer toutes les castes d’abeilles (ouvrières, mâles, reines) et toutes les classes d’abeilles (nourrices, magasinières, butineuses, abeilles d’hiver) ;
• le nectar et le pollen ramenés à la ruche sont mis en magasins. Si le nectar peut servir à la consommation immédiate, le pollen nécessite une fermentation d’une semaine au minimum pour être digestible par l’abeille. Les réserves sont consommées pendant les périodes sans récolte de l’année et particulièrement lors de l’hivernage. Du pollen récolté en août peut ainsi être consommé en mars ou début avril seulement, ce qui représente une consommation différée de 7-8 mois parfois, donc une contamination éventuelle différée d’autant ;
• Vu la longueur de la floraison et la possible contamination de réserves consommées au fur et à mesure des besoins, la contamination peut s’étendre sur de très longues périodes, (les produits pulvérisés sont en général plus rapidement dégradés, principalement par la lumière). Les contaminations éventuelles peuvent donc avoir des effets chroniques, létaux ou sublétaux.
Si le PPP est neurotoxique, ces effets sublétaux peuvent concerner, à priori, toute la gamme des schémas comportementaux de l’abeille : faculté d’orientation, réflexes nécessaires au butinage, relations des abeilles entre elles nécessaires à la survie et au développement de la colonie ; Enfin, il faut se souvenir que l’abeille est en contact avec les insecticides TS par d’autres voies que le butinage. Les poussières répandues lors du semis contaminent largement l’environnement ; elles sont responsables des graves incidents survenus en 2008 en Italie, Allemagne et Slovénie, qui ont coûté la vie à des dizaines de milliers de ruches. Enfin, les jeunes plants de quasiment toutes les cultures exsudent de l’eau très chargée en insecticide, ce qui a pour effet aussi de contaminer la rosée éventuelle. Or, les eaux de rosée et d’exsudation sont une source majeure d’eau pour toute l’entomofaune. L’importance réelle de ces voies d’exposition reste aujourd’hui méconnue des autorités.